Quand l’amour meurt en dernier

Quand l’amour meurt en dernier

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Avec son livre « Je n’ai jamais renoncé à l’amour », Luce Dubois, 75 ans, relate un demi-siècle de vie sentimentale. Avec humour, tendresse et authenticité, l’auteure évoque les hommes dont elle est tombée amoureuse, son expérience des agences matrimoniales, du Minitel et des sites de rencontres. L’écrivaine met également l’accent sur la solitude, et plus particulièrement celle qui guette les personnes âgées. Car, si vivre en couple permet de rompre l’isolement qui touche les seniors, c’est pourtant à ce moment de la vie que l’on se retrouve seul. Et c’est bien connu, l’amour ne s’arrête pas avec l’âge. Rencontre avec une femme des plus touchantes.

Roster Con : Le titre de votre livre est : « Je n’ai jamais renoncé à l’amour ». Qu’en est-il au jour d’aujourd’hui ?

Luce Dubois : Question extrêmement difficile. Je n’ai pas renoncé à faire des rencontres, malgré toutes celles que j’ai faites, – hélas non concluantes -, je ne suis pas découragée pour autant. Je suis toujours inscrite sur Meetic. Aujourd’hui, je dirais que me laisse un peu porter par le hasard. Mais très franchement, lorsque je sors, que cela soit pour un dîner, un concert, ou voire même pour effectuer quelques courses, sans que cela ne devienne obsessionnel bien évidemment, je garde toujours un petit espoir d’une rencontre qui pourrait se révéler agréable. Mais, je ne romprais pas ma solitude – je devrais plutôt employer le mot célibat car je suis loin de vivre comme une recluse – avec n’importe qui, pour une relation médiocre, histoire de dire « haut et fort » que je ne suis pas une femme seule. Je préfère de loin m’ennuyer seule qu’avec un homme à mes côtés !

Croyez-vous au coup de foudre ? A l’âme sœur ?

Par définition le coup de foudre est une sorte d’alchimie qui s’empare de deux êtres. C’est quelque chose de terrible et de merveilleux à la fois, qui vous tombe dessus au premier regard, qui vous tétanise, vous rend dépendant de l’autre, mais qui peut vous détruire. Les scientifiques ne l’expliquent pas vraiment. D’après plusieurs études, cela n’aurait rien de romantique et ne serait qu’une réaction chimique du cerveau, réagissant à la vue et à l’odeur de l’autre. Des chercheurs affirment que des molécules bouleversent notre corps à un tel niveau qu’il est possible d’en perdre totalement le contrôle. Ces molécules seraient de véritables drogues. Elles seraient responsables de nos transformations physiques. Sur le coup de foudre, on dit tout et n’importe quoi : certains prétendent même ressentir des papillons dans le ventre ! Fort heureusement, à quelques exceptions près, cet état émotionnel serait tellement puissant qu’il ne durerait pas. Si cela était le cas, nous serions bien loin de la pluie d’étoiles filantes en plein jour ! La réalité serait beaucoup moins glamour ! Cet état, en principe, ne devrait pas perdurer au-delà de quatre ans ! J’ai interrogé certaines amies. Plusieurs disent avoir eu un coup de foudre. Personnellement, je n’ai jamais ressenti ce genre de symptômes, je n’ai par conséquent pas connu de coup de foudre et il m’est bien difficile d’en parler. Cependant, ce que j’admets, c’est qu’il existe des rencontres plus fortes les unes que les autres. En ce qui concerne l’histoire de Sylvère, – que je n’ai jamais oublié – je qualifierai plutôt le premier matin comme une révélation. J’ai tout de suite compris que je venais de tomber amoureuse de l’homme qui dormait encore à mes côtés. Cela a été une évidence immédiate.

L’âme sœur n’est pas nécessairement la moitié d’un couple. Il peut s’agir de deux frères, deux amis, …

J’ignore s’il faut croire à l’âme sœur, sans risquer de tomber dans l’ésotérisme. En réalité, il n’y a pas d’explication relationnelle concernant l’âme sœur. Par contre, il est vrai que je crois à la complicité de deux êtres qui sont en phase, et qui sont capables de ressentir le mal être de l’autre, à distance. Certaines connexions sont inexplicables. L’âme sœur n’est pas nécessairement la moitié d’un couple. Il peut s’agir de deux frères, deux amis, … Une petite anecdote personnelle : j’avais un frère de quatre ans mon aîné, avec lequel j’étais très complice. En plaisantant, nous disions toujours que nous étions des jumeaux, parce que nous vivions quelque chose de fusionnel, d’inexplicable, ce qui n’existait pas avec mes deux autres frères. Suite à un conflit familial, nous avons cessé de nous fréquenter. Un jour où je regagnais mon domicile, je roulais en voiture sur l’autoroute. Alors que je n’avais aucune nouvelle de lui depuis plus de dix ans, soudain, sans raison particulière, il m’est apparu dans un flash. Pendant un instant, quelques souvenirs ont ressurgi. A ce moment précis je me souviens parfaitement avoir pensé : « S’il lui arrivait quelque chose, je crois que je le sentirais » parce que nous étions liés de façon presque viscérale. Environ deux mois après, j’ai appris, par des amis communs, qu’il était décédé trois jours après mon flash. Ne se sentait-il pas bien ce jour-là et avait-il pensé à moi ? S’agissait-il d’un message ? Nul ne le saura jamais. Cet événement m’a laissée un peu perplexe, car même sans contact depuis de nombreuses années, il subsistait un lien indestructible, sur lequel je me garderai bien de mettre un nom !

Dans votre témoignage, vous évoquez la solitude des personnes âgées, et plus particulièrement la déprime, le suicide. Avez-vous connu un passage de profonde dépression ?

Non, fort heureusement, je n’ai jamais eu de dépression, encore bien moins profonde, tout au plus quelques petits passages à vide, mais le travail me poussait toujours, je n’avais pas le temps de m’apitoyer sur mon sort. Je remettais toujours mes états d’âme au lendemain. Je suis un peu comme Scarlett O’Hara qui, dans les pires moments de sa vie, disait : « Taratata… J’y penserai demain » Et le lendemain était déjà un autre jour.

Vous avez fait des rencontres via Internet, le minitel, les agences matrimoniales mais aussi par hasard. Selon vous, quel est le meilleur moyen au final pour rencontrer quelqu’un ?

Des rencontres entre amis, des dîners, des sorties – en particulier, ceux auxquels nous n’avons pas le désir d’aller –, ce sont généralement ces soirées-là qui se passent le mieux. Surtout ne jamais refuser une invitation parce que l’envie nous manque, que l’on ne connait presque personne et que l’on imagine – souvent à tort – que l’on va s’ennuyer. Mais je crois savoir que le milieu professionnel reste en tête, en ce qui concerne les rencontres, tant que nous sommes en activité bien entendu.

Il est indispensable d’élargir son cercle relationnel le plus possible, et surtout de ne JAMAIS s’enfermer dans la solitude

Quels conseils donneriez-vous aux personnes âgées qui se sentent seules ?

La dernière des attitudes à adopter est celle de rester à la maison, parce que ces personnes pensent qu’à partir d’un certain âge, elles n’intéressent plus personne. Par timidité souvent, elles s’enferment dans leur solitude ; c’est une TRES mauvaise amie ! Sous aucun prétexte elles ne doivent refuser l’invitation d’un voisin qui frappe à leur porte pour tirer les rois, boire un café, ou pour toute autre occasion. Lorsqu’on est seul, en particulier à un certain âge, lorsqu’on n’a plus d’activité, il est indispensable d’élargir son cercle relationnel le plus possible, et surtout de ne JAMAIS s’enfermer dans la solitude, qui trop souvent conduit à la dépression. Pour des raisons différentes, tout le monde intéresse quelqu’un.

Publié le 10 juillet 2017
Dernière mise à jour le 15 février 2018

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